Sorbonne Université, Université de Strasbourg, Aix-Marseille Université, PSL… Depuis une dizaine d’années maintenant, le paysage universitaire français voit émerger des acteurs d’un genre nouveau, résultant de la fusion d’établissements traditionnels. Historiquement, le système universitaire en France s’est construit autour de trois pôles d’enseignements distincts, aux volontés et modes de fonctionnements divers : les instituts de recherche, les grandes écoles et les universités. Véritable spécificité à la française, ce triptyque est donc remis en question par ces acteurs inclassables : les Universités (avec un grand “U”). Mastodontes de l’enseignement par leur nombre d’étudiants et le large panel de disciplines enseignées, les Universités affichent presque toutes un objectif simple : constituer des universités de recherche globales, attirant les meilleurs étudiants et chercheurs au monde. En bref, redorer le blason du système universitaire français pour qu’il puisse enfin s’inscrire à la tête des prestigieux classements internationaux (classements de Shanghai, QS, THE, …). Car pour s’y imposer, la France doit uniformiser son système sur le modèle mondial : l’université de recherche.
Prenons l’exemple des critères de notation du classement de Shanghai. Celui-ci repose sur six points : le nombre d’anciens élèves ayant reçu un prix Nobel (sauf Paix et Littérature) ou une médaille Fields, le nombre de chercheurs parmi les plus cités dans leur discipline dans les dix dernières années, le nombre d’articles publiés dans les revues Nature et Science dans les cinq dernières années, le nombre d’articles indexés (recensés) par Science Citation Index et Social Sciences Citation Index et le score total des cinq derniers indices rapporté à la taille du corps professoral. Un premier constat est évident : plus une université dispose d’enseignants-chercheurs et d’étudiants, plus celle-ci est en mesure d’avoir un score élevé. Revenons alors à notre système français : quelle est, au regard du classement de Shanghai, la pertinence d’un paysage universitaire fragmenté ? Inévitablement, si l’attractivité du système universitaire français repose sur la performance dans les classements internationaux, instituts de recherche et grandes écoles devraient s’effacer au profit d’un organisme plus global.
Cet article cherchera donc à questionner la pertinence de l’effervescence des fusions universitaires en France face à l’objectif affiché d’améliorer la compétitivité internationale de nos établissements d’enseignement supérieur. Il prendra la forme d’un entretien avec Alain Fuchs, ancien président de Chimie ParisTech et du CNRS, aujourd’hui à la tête de PSL depuis 2017.