Frénésie des fusions dans le monde universitaire : quelles stratégies doit privilégier l’enseignement supérieur français pour être plus attractif à l’international ? Entretien avec Alain FUCHS

Doter les nouvelles grandes universités comme PSL d’un capital est-il le symbole d’une direction de l’enseignement supérieur français vers un enseignement privé ? 

A.F. : « Les universités que l’on construit sont des universités publiques. Le fait d’être doté d’un capital dont on ne touche que les intérêts est une subvention de l’État, au fond. Je ne peux pas emprunter de l’argent par exemple pour acheter des bâtiments etc. Tout ça est très réglementé. Il y a des débats bien sûr autour de ces nouvelles universités : où va-t-on ? Comment le modèle se transforme-t-il ? Je ne crois pas du tout que nous nous dirigions vers une privatisation de l’enseignement supérieur, mais je peux me tromper.

Je pense que nous sommes tous très attachés à des universités publiques, que nous sommes très loin de ce que pourrait être une université privée. Une université privée c’est une université qui engendre des revenus suffisamment importants pour payer, notamment, le poste le plus important d’un budget universitaire : les salaires (des enseignants, le personnel, etc.). Je pense qu’on est très loin de la volonté de faire ça, je pense qu’il y a un sentiment de service public universitaire qui est très fort en France.

« Il faut être prêt à ce qu’on ait des relais dans nos budgets qui nous permettent de ne pas dépendre que de l’État. »

Mais, qui dit université publique ne dit pas que ça empêche d’avoir des degrés d’autonomie. Je vais prendre un exemple assez célèbre, celui des grandes universités californiennes (Berkeley, Santa Barbara, San Diego, …). Ce sont des universités publiques et elles sont pourtant « riches ». Elles ont réussi à attirer de l’argent privé (c’est très souvent des donations de leurs anciens élèves qui ont fait fortune). Ce modèle d’université publique dépendant de l’État, délivrant des diplômes qui sont reconnus par l’État, avec des financements privés, c’est un modèle qui existe dans beaucoup de pays, qui fonctionne bien et qui permet notamment à ces universités de disposer d’un degré d’autonomie qui est relativement important : le président de Berkeley me disait que la part publique dans son budget ne représentait plus que 25 %. On n’ira évidemment pas jusque-là en Europe et en France mais il faut bien réaliser que les États sont dans des difficultés qui peuvent être énormes : il faut être prêt à ce qu’on ait des relais dans nos budgets qui nous permettent de ne pas dépendre que de l’État. »

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