Cette semaine, Lundi Alumni vous raconte l’histoire de Louise, CPESienne issue de la troisième promo, en 2017. Originaire de la Guadeloupe, avec un tropisme pour le Japon, venez découvrir le parcours de Louise.
« J’entends parler du CPES alors que je suis déjà acceptée à l’École Polytechnique de Montréal et que je prépare déjà mon visa »
Originaire de la Guadeloupe, Louise entend parler du CPES pour la première fois grâce à son professeur de maths qui l’inscrit à un atelier de présentation de cette formation. « C’est vrai que j’avais un profil pluridisciplinaire avec beaucoup d’affection pour la philosophie depuis le collège ». Louise se met alors à considérer cette nouvelle formation comme une option intéressante : elle est séduite par l’éventualité de continuer la philosophie avec la SVT. « Et puis, j’ai eu un peu peur de m’enfermer dans un silo disciplinaire ». C’est décidé, Louise débarque à Paris la rentrée suivante.
« En sciences expérimentales et avec mes options, j’avais 46 heures de cours par semaine et des matières qui en demandaient presque deux heures de travail personnel, c’était dur ».
L’adaptation est difficile. Tout est nouveau, tout est différent et l’emploi du temps est surchargé. « En sciences expérimentales et avec mes options, j’avais 46 heures de cours par semaine et des matières qui en demandaient presque deux heures de travail personnel, c’était dur ». Louise est également déçue par le manque de cours de biologie au sein de sa filière. « Sans spécialité, il y avait beaucoup beaucoup beaucoup de physique ». Très vite, elle fait remonter à l’administration du CPES ses déceptions, en militant également pour l’ouverture d’une filière avec une spécialité en biologie et géologie. « C’était un peu un dialogue de sourds, nous n’avons pas vraiment eu les retours que nous attendions. Au contraire, même, l’administration a préféré couper sur des cours d’ouverture culturelle qui étaient très importants ». En L2, Louise change de stratégie. Elle se force à changer de rythme, se lève plus tôt, pour s’accorder une heure d’activité extrascolaire. « En dehors du CPES, le seul truc régulier que j’arrivais à faire c’était de la danse orientale », qu’elle continue d’ailleurs toujours de pratiquer. Les sciences de la vie et de la Terre, son projet de départ, lui manquent toujours autant. Elle commence à discuter un peu à droite à gauche avec les différentes administrations de PSL pour prendre des cours optionnels en géosciences à l’ENS en complément de sa troisième année au CPES. Son stage, en L2, au sein du département de géosciences de l’ENS sera décisif et orientera également la suite de son parcours.
« Sur les vingt étudiantes et étudiants du début, moins de dix personnes sont restés jusqu’au bout »
Du CPES, Louise garde des souvenirs très intenses, en particulier pour ses camarades et de la cité universitaire. « Avec les gens c’était incroyable, j’ai gardé des liens très forts avec beaucoup d’entre eux et on est toujours en contact ». Elle souligne tout de même, le CPES n’était pas facile mentalement. « Sur les vingt étudiantes et étudiants du début [en sciences expérimentales], moins de dix personnes sont restées jusqu’au bout ».
« C’est vraiment le stage de L2 et projet bibliographique de L3 qui m’ont permis de trouver un tuteur et de m’orienter »
Après le CPES, Louise intègre l’ENS en tant qu’étudiante normalienne au sein du département de géosciences. « C’est vraiment le stage de L2 et projet bibliographique de L3 qui m’ont permis de trouver un tuteur et de m’orienter ». En arrivant à l’ENS, Louise demande à refaire une L3 car elle est très intéressée par les cours de minéralogie, d’océanologie et de géologie proposés. « Ce qui est bien avec la formation de l’ENS en géosciences, c’est que l’offre de cours est très diverse : en première année on peut toucher à tout ». C’est grâce à cette opportunité que la fibre pluridisciplinaire de Louise s’exprime de nouveau. « On est théoriquement obligé de prendre des cours dans d’autres départements, alors j’ai commencé à regarder du côté des études orientales ». En L3 déjà, Louise avait commencé à apprendre le japonais, à ces heures perdues. « Je me suis intéressée à cette langue grâce à deux auteures que j’aimais beaucoup. J’avais l’impression de perdre beaucoup de leur œuvre en ne lisant que leurs traductions. Je me suis dit que ce pouvait être marrant d’apprendre à lire et écrire le japonais ». Grâce à ses cours à l’ENS, Louise se rend compte qu’elle a appris à écrire à l’envers l’alphabet et qu’elle doit tout reprendre ! « Mais j’étais très motivée, j’adore étudier l’évolution de la langue et l’histoire de chaque alphabet ».
« J’étais dans une période de ma vie où je me posais beaucoup de questions, c’était aussi un moment où je frôlais le burn-out et j’accusais le contre-coup du CPES »
Sa première année de master arrive : elle décide de s’orienter vers l’étude des sols : elle est très intéressée par les phénomènes de contamination des sols par les métaux lourds. « En M1, il y avait un stage de cinq à six mois, j’ai décidé de partir aux États-Unis ». Louise part à Berkeley pour étudier l’oxydation du sélénium dans les sols qui est liée aux enjeux de contamination des sols et des organismes qui y sont liés. Ce séjour aux États-Unis tombe à point nommé. « J’étais dans une période de ma vie où je me posais beaucoup de questions, c’était aussi un moment où je frôlais le burn-out et j’accusais le contre-coup du CPES, c’était une période de blues ». Louise a beaucoup aimé Berkeley, pour ses parcs, pour son environnement international, pour la coopération étudiante dans laquelle elle a vécu pendant six mois, pour le bol d’air frais qu’elle a ressenti, pour le laboratoire dans lequel elle a fait son stage malgré quelques problèmes rencontrés. « L’instrument dont j’avais besoin pour mener à bien ma recherche a cessé de fonctionner correctement ». Cela ne l’a pas empêché de terminer son mémoire dont ses professeurs, ont salué le regard critique.
« Il faut qu’on en parle plus pour sensibiliser les gens sur les sols sur lesquels ils évoluent. »
De retour en France, Louise ne retourne pas directement à Paris. Elle a envie d’apprendre à faire de la médiation scientifique. « Il faut qu’on en parle plus pour sensibiliser les gens sur les sols sur lesquels ils évoluent. Les sciences de la Terre sont des disciplines qui font peu de médiation et qui ont parfois du mal à expliquer ce qu’elles font ». Son année de césure, elle la fera à Grenoble, au sein d’un master de communication scientifique. C’est un master professionnalisant et très appliqué, qui lui permet de toucher à une grande variété de médium. « Je savais que j’aimais bien tourner des films documentaires. En L3, ma classe et moi avions tourné un film documentaire sur la perception des populations de l’Etna. Je m’étais rendue compte que j’aimais ça, faire du terrain, aller filmer et interroger les gens ». Louise décroche un stage au sein de la direction culturelle de l’université de Grenoble. Avec ces deux expériences, elle jette les premières pierres de ce qui deviendra, un an plus tard, son projet de thèse.
« J’ai fait mon stage sous la tutelle de ces deux chercheuses et ça m’a permis de faire mûrir un projet de thèse autour de la médiation et communication scientifique »
Son M2 et dernière année à l’ENS, Louise l’effectue au sein de l’Institut de Physique du Globe de Paris et en partie en ligne. « J’ai eu, comme tout le monde, beaucoup de cours à distance, des cours très intéressants mais je n’ai pas eu l’impression de beaucoup travailler. J’ai pris des cours supplémentaires en volcanologie, en pétrologie et en physique des sites naturels », matières qui seront décisives pour sa thèse. Pour valider son master, Louise doit réaliser un dernier stage, ce qui s’avère compliqué à cause des contraintes sanitaires liées au COVID. Au dernier moment, elle tombe sur une offre de stage au sein d’un master de risques naturels, ciblant la crise sismo-volcanique de Mayotte qui a lieu depuis 2018 et a mené à la formation d’un nouveau volcan, et plus précisément encore sa couverture médiatique. « C’était presqu’un coup du destin si ce n’est que le stage était calibré pour un étudiant en début de master ». Qu’à cela ne tienne, Louise contacte les deux chercheuses référentes. Intéressées par sa motivation et son profil, ces deux chercheuses débloquent des fonds pour un second stage, calibré pour une étudiante en fin de master. « J’ai fait mon stage sous la tutelle de ces deux chercheuses et ça m’a permis de faire mûrir un projet de thèse autour de la médiation et communication scientifique mises en place au moment de la crise sismo-volcanique à Mayotte ». À la suite de son stage, aidée de ses encadrants Louise dépose un projet de thèse. Il est accepté. En digne CPESienne pluridisciplinaire jusqu’au bout, elle fait donc désormais non seulement des sciences de la Terre, mais également des sciences sociales et sciences de l’info-communication au sein de l’Institut de Physique du Globe de Paris.