Verdun, 24 avril 1916
Ma chère Lucie, Merci pour ton amour et ton soutien qui m’apaisent un peu. Tu dis que je semble triste dans ma précédente lettre, et c’est le cas. Je suis triste et fatigué. À cela s’ajoute la mort récente de mon frère, Alexis. Je suis désolé de te l’annoncer ainsi, mon amour, je sais que tu l’appréciais beaucoup. Comme tu le sais, nous étions dans le même bataillon et nous avions eu la chance d’être restés ensemble une fois arrivés à Verdun. Alexis est décédé il y a maintenant trois semaines, en essayant de sauver un de ses amis qui avait perdu sa jambe et ne pouvait plus fuir. Il a toujours voulu aider les autres, mais jamais je n’aurais imaginé que ça lui coûterait la vie. Il me manque. C’est comme s’il y avait un vide en moi, un trou béant, douloureux, qui palpite. Son absence est trop présente, insupportable. Parfois, je regarde derrière moi et le cherche encore du regard. Quand je croise d’autres soldats, je les dévisage en espérant qu’Alexis soit parmi eux. Il est partout sans être là. J’ai l’impression que je meure un peu de l’intérieur. Je déteste cette guerre et ce qu’elle nous fait. Ne l’annonce pas encore à mes parents s’il-te-plaît, je vais leur envoyer une lettre séparée. J’espère que tu vas bien. Prends bien soin de toi, surtout si tu es un peu malade comme tu le dis. Je t’aime,
Marc Deschaux
Caporal, 146e régiment d’infanterie