What time is it ? Lundi Alumni time ! Malgré les difficultés à se déplacer en ces temps troublés, Nelly Alandou nous fait voyager en nous racontant son parcours captivant depuis Berkeley en Californie…
Après sa scolarité à Abidjan en Côte d’ivoire dans un lycée français, Nelly hésite entre une licence en mathématiques ou postuler aux Beaux-Arts. “J’avais prévu d’aller à l’institut Pierre et Marie Curie. Mon père voyait que j’étais désespérée et a cherché pour moi une voie alternative. On a découvert le CPES deux jours avant la fin des inscriptions. L’idée me plaisait beaucoup, j’aimais le format entre la prépa et l’université, et surtout le fait que je pouvais continuer à avoir un lien avec l’art”. Elève de la première promotion, elle commence le CPES en Sciences à Henri IV puis en maths-physique à l’ESPCI en deuxième année et troisième année à Dauphine. “Après ces trois années de licence, je voulais toujours intégrer une école d’ingénieur et partir à l’étranger même si le CPES n’est pas la première voie d’accès à laquelle on pense pour cela”.
Elle se rend compte après le CPES que les maths théoriques ne lui conviennent pas et cherche donc une autre application : “L’un des domaines où les maths sont le plus demandés à un niveau très élevé, c’est l’aéronautique”. En fonction du classement, des moyennes de la licence, les étudiant ont accès à certaines écoles auxquelles on peut envoyer son dossier. Le cadre du CPES propose un accès pour les écoles ou master où on peut être pris sur dossier comme pour les Mines ou l’ESPCI, mais pour certaines écoles, il faut passer par l’admission sur titre. Il s’agit, en plus de la préparation du dossier, d’une épreuve écrite, d’un oral de type colle et d’un entretien de motivation. Nelly prépare donc les admissions sur titre et est admise à Supaéro. Cependant, l’ambiance de Supaéro lui plaît nettement moins que celle de PSL :
“Les étudiants me paraissaient plus ouvert d’esprit à PSL, et l’ambiance d’école d’ingénieur ne me plaisait pas. Je ne sais pas si c’est lié au milieu social ou spectre politique des étudiants, mais certains avaient des propos racistes, que ce soit inconsciemment ou gratuitement. C’était une minorité, mais elle était dérangeante et a en partie altéré mon expérience à Supaéro. Mais à côté de ça j’ai aussi rencontré des personnes extraordinaires et avec qui j’ai gardé un lien fort”.
Au CPES et à Supaero, Nelly est déléguée. “J’aime les gens en général” dit-elle en riant. “La première année au CPES, nous avions beaucoup de choses à relayer à l’administration ce pourquoi on a créé l’association. À Supaero, les mécanismes de communication étaient souvent ignorant des problèmes des admis sur titre, et c’est pour palier cela que j’ai été déléguée. C’est souvent les plus négligés qui sont à même de voir les problèmes, pas seulement pour eux mais aussi en général, ce pourquoi je pense qu’une diversité dans ce genre de rôle est nécessaire.”
La formation de Supaéro se fait en trois ans, sauf dans le cas d’un double cursus à l’étranger qui demande une année de plus après avoir passé la troisième année à l’étranger (à l’exception des doubles cursus aux Etats-Unis). Nelly se trouve bien préparée pour sa nouvelle école, avec un petit retard en physique et en mécanique : “J’ai découvert certaines choses la première année que les prépas avaient déjà bien étudié, mais il y a un suivi particulier pour les admis sur titre qui permet largement d’égaliser le niveau”. En témoigne le fait que seuls les meilleurs élèves ont accès au cursus aux Etats-Unis dont fait partie Nelly.
L’attrait de Nelly pour l’étranger lui vient en grande partie de ses parents. “Très tôt, depuis mes 5-6 ans mes parents ont insisté sur l’importance d’une formation académique solide. Ils voulaient que j’aie une formation solide avec une licence voire un master en France puis une expérience aux Etats-Unis pour parfaire un esprit critique et d’application. Et puisque c’étaient mes parents qui payaient tout ce que la bourse ne pouvait couvrir, ce qui était important pour mes parents l’était par défaut pour moi.” L’avantage de Supaero ? Le double cursus avec l’université californienne de Berkeley. Ce n’est pas que pour écouter ses parents qu’elle s’est dirigé vers les Etats-Unis.
“Berkeley est très mentionné dans les médias, les films, et j’avais en tête cette même image de la liberté. En plus, en termes de climat c’était bien mieux que de rester à Paris”.
À Supaéro, la candidature au double cursus est autorisée qu’à une seule université : elle postule à Berkeley et est acceptée dans un cursus de système des transports. “Quand j’étais à Berkeley, j’ai réalisé que mes parents avaient raison : il y a une grosse différence avec le système français. Là-bas, les élèves n’avaient pas vraiment les bases que fournit l’éducation française, notamment en termes de statistiques par exemple, mais à côté ils avaient bien plus de connaissances sur les régulations, les procédures… Une compréhension intuitive de beaucoup de choses. Ce qui me manquait c’était une capacité intellectuelle à arriver plus vite aux résultats sans sacrifier la précision des résultats.”
Aux Etats-Unis, elle fait un Master of Engineering. “Deux tiers des cours étaient similaires a des cours de Master of Science, et un tiers MBA avec des cours de management et d’entreprenariat : comment créer une entreprise, un business etc. C’était une expérience exceptionnelle, et même si du point de vue du master français on a l’impression que c’est beaucoup plus simple, c’est en réalité très enrichissant et formateur. Je voulais par ailleurs continuer à avoir un lien avec l’aéronautique mais tout en conservant une dimension relationnelle et humaine. J’ai donc fait six mois de recherche en aviation avec une professeure de Berkeley en parallèle de mon second semestre puis de ma première année de travail. Au-delà de sa valeur scientifique, ce projet m’a permis de bénéficier d’une plus grande flexibilité dans les relations, pour aborder les gens et travailler avec eux.”
Nelly a également effectué beaucoup de stages, dont trois en entreprise. “Mes parents et ma sœur mentionnaient souvent l’importance d’avoir des expériences professionnelles. Ma sœur qui travaillait à l’époque dans les ressources humaines avait insisté sur le fait qu’il fallait montrer qu’on avait des centres d’intérêt divers, qu‘on faisait l’effort de faire autre chose que nos études, car l’expérience témoigne d’une curiosité et fait la différence lors d’un entretien selon elle. Mon objectif était de faire un stage par an.” En première année, elle réalise un stage de recherche appliquée à l’été 2013 en statistiques et neurosciences à Dauphine. Elle participe en deuxième année au stage de journalisme à l’IPJ à Dauphine également. Ensuite, elle effectue un stage rémunéré chez Parrot en optimisation de processus de production marketing puis recherche en intelligence artificielle. A la fin de sa première année d’école, elle réalise son stage ouvrier obligatoire en Côte d’Ivoire sur un chantier de construction “L’idée était de se rendre compte de la pénibilité du travail, et d’apprendre le respect des travaux manuels.” Au deuxième semestre de sa deuxième année, elle fait un stage de recherche en entreprise, chez Dassault, en optimisation, domaine qui est beaucoup recherché et lui a donc permis de valoriser d’autant plus son CV aux Etats-Unis.
Cela fait maintenant presque trois ans qu’elle travaille chez InterVISTAS Consulting en tant qu’Airport planning Consultant. L’entreprise est spécialisée dans l’aviation et les aéroports. “C’est rare quand on est un ‘jeune cadre dynamique’ de travailler aussi longtemps dans une même entreprise mais j’aime beaucoup l’équipe avec laquelle je travaille et j’y suis très bien.” Elle se penche sur les conseils en planification : “Côté long terme il s’agit de définir comment déterminer la demande sur les 5, 10, 15 prochaines années en fonction des paramètres économiques, mettre en place les sources de revenus pour financer les investissements, optimiser l’utilisation des espaces… Sur le court terme, il faut fournir des solutions dans l’intérim en attendant la réalisation de ces futurs projets”. Elle découvre dans cette entreprise un monde professionnel différent de celui français :
“Je travaille avec une équipe géniale. La hiérarchie est beaucoup moins verticale qu’en France. Indépendamment du niveau d’expérience, on est impliqués dans les processus de décision, intégrés avec les équipes qui communiquent directement avec le client pour les gestions de projets… Les gens sont vraiment passionnés : mes collègues sont presque obsédés par leur travail. La flexibilité est très grande aussi. Avant la Covid, je voyageais toutes les deux semaines pour le travail, c’était vraiment génial. Cette ambiance détendue n’empêche par ailleurs absolument pas les résultats. ”
Elle est très satisfaite de son parcours et de son travail qui ne l’empêchent pas en parallèle d’avoir une vie artistique. “De PSL à Supaéro j’ai toujours eu ce fil conducteur de la peinture, je l’ai gardé en option dans mon école d’ingénieur et j’ai réalisé ma première exposition à Berkeley. Une formation artistique plus formelle m’aurait certes servie mais je n’ai aucun regret, car ma carrière scientifique n’empêche pas celle d’artiste, aucune porte n’est fermée.” Allez retrouver son compte instagram @iam_nelfa dédié à ses créations et œuvres picturales !
Par la suite, Nelly ambitionne d’ouvrir un cabinet de consultant en Afrique de l’Ouest, en Côte d’Ivoire particulièrement, dans les quinze prochaines années et, plus immédiatement, de poursuivre sa carrière en Europe. “J’espère rentrer bientôt en Europe, la crise m’a ouvert les yeux sur la nécessité d’être plus proche d’une culture dont je suis familière. Même si sur le plan professionnel c’est très intéressant, j’ai trouvé difficile sur le plan humain de nouer des liens forts aux Etats-Unis par rapport à la France et à la Côte d’Ivoire.”
Article par Lena Perrinet et Marine Bachot