Différents présidents de la Vème république ont voulu réformer les retraites. Certains se sont retrouvés avec une foule dans les rues pour protester contre leur proposition de réforme. Pour d’autres, celle-ci est passée comme une lettre à la poste. Sans surprise, celle portée par Emmanuel Macron, bien que modifiée et moins sévère que sa version initiale, ne connaît pas un franc succès. Pour cause, cette réforme est souvent résumée par deux de ses mesures : le report de l’âge de départ à la retraite à 64 ans ; et il faudra dorénavant cotiser durant 43 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Alors, en fouillant un peu (mais pas trop) pouvons-nous trouver des mesures positives ?
Une mesure intéressante de la proposition de réforme macroniste est la définition de la retraite minimale à 85% du Smic soit 1200 € brut. Actuellement, le seuil du minimum contributif (mico) est de 747,57 € brut par mois (avec une durée de cotisation d’au moins 120 semestres). Par ailleurs, même si on note un progrès de 450 €, ce n’est pas suffisant et est ce que les 1200 € concernent le mico ?
De 1200 à 747,57 € vraiment ?
En effet, selon une étude de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (INPES) de 2015, il faut 1150 euros par mois, à une personne seule retraitée propriétaire, pour « vivre décemment »; or depuis 2015, les prix ont augmenté. Selon France-Inflation, l’indice d’inflation est passé de 2500 (2015) à 2799 (fin 2022), soit une inflation cumulée de 12% en 7 ans… De plus, le minimum à 1200 brut concerne uniquement les artisans, commerçants … qui étaient au smic pendant toute la durée de leur carrière, et il faut également que les travailleurs aient eu une carrière complète, soit qu’ils aient cotisé pendant 43 ans. Ainsi, cette mesure ne concerne que 40 000 nouveaux retraités chaque année (selon Libération) et donc, les 1200 brut n’ont pas de lien avec le mico. Tout de même la réforme propose une revalorisation du mico, il devrait augmenter de 100 €.
Aussi, avec cette réforme le gouvernement promet qu’aucune personne ayant commencé à travailler tôt ne soit obligée de travailler plus de 44 ans. Par exemple, si une personne a commencé à travailler à 15 ans, elle pourra partir à 59 ans. Aujourd’hui, même si vous avez commencé à travailler avant 20 ans, il vous faut cotiser 45 ans (si vous êtes nés après 1973). De toute manière, 45 ans, 44 ans, c’est plus la durée d’une vie d’une baleine à bosse que d’une période de cotisation.
Alors, plus que de manifester contre la réforme, ne s’agit-il pas de manifester contre une vision de la société qui érige le travail comme phare de notre existence ?
Une autre mesure de la réforme proposée porte sur la meilleure prise en compte de la pénibilité des métiers. Par exemple, le seuil actuel pour être considéré comme exposé au « travail de nuit » (au minimum une heure de travail entre minuit et 5 heures) est de 120 nuits et la réforme le fera passer à 100 nuits. Tandis que, pour le travail de nuit en équipes passerait de 50 à 30 nuits. Des points positifs certes, mais qui sont considérés par les principaux syndicats (CGT, CFDT…) comme insuffisants comparativement à la suppression en 2017 de 4 critères de pénibilités. De plus, pour l’instant (14 février), la retraite anticipée à taux plein pour les travailleurs ayant un emploi pénible reculerait de deux ans (60 à 62 ans).
Enfin, un dernier point, si le gouvernement veut allonger la durée de travail, il doit s’assurer que les séniors se feront embaucher, ce qui ne semble pas du tout être une évidence. Lors de la manifestation du mardi 31 janvier contre cette réforme se trouvait David qui, à la question “Aimez-vous votre travail ?”, a répondu oui. Il aime tellement son métier qu’après 15 ans de travail dans le cartonnage, il a fait un AVC de surmenage. David s’est alors retrouvé sur le marché du travail à plus de 55 ans et cela a été très compliqué pour lui de retrouver un emploi. Alors, pour que les travailleurs et travailleuses ne se retrouvent pas dans la même situation que David, le gouvernement avec sa réforme veut imposer un index sur les emplois seniors dans les entreprises d’au moins 300 salariés. Mais cette mesure vient d’être rejetée par les députés avec 256 voix contre et 203 pour.
Ainsi, comme un bras de fer entre deux frères où aucun ne veut céder, les deux camps continuent de s’affronter, dans la rue et dans l’hémicycle.
Les différentes sources utilisées :
° Le Monde
° Vie Publique
° Libération
° INPES
° Figaro
° France-Inflation