À l’occasion de la sortie du film Journey to the Center of Time, le magazine Retrograde vous propose le compte-rendu exclusif de Tim Traveller, premier à voyager à travers le temps et l’espace. Ayant fait halte au Musée Royal de Mariemont en Belgique, Tim revient non pas d’entre les morts mais d’entre les futurs terriens…
« Vous vous attendiez à des voitures volantes à l’ère du génie technologique ? Détrompez-vous, les masques et le gel dit « hydro-alcoolique » sont les accessoires les plus prisés du XXIe siècle. Néanmoins, laissez-moi vous faire part d’une expérience qui m’a pour le moins fasciné.
En septembre 2020, il m’a été donné de pénétrer dans un véritable cabinet des curiosités illustrant en huit sections le thème « autour du temps », souvent anxiogène. Sous la commission de Sofiane Laghouati, « Bye Bye Future » donne le la à Katia Bourdarel, Fred Biesmans, Stéphane Halleux et tant d’autres artistes de talent qui brossent avec brio nos façons de percevoir le futur : alternatif, témoignant d’un passé «idéalisé» ou de préoccupations humaines et universelles, que ce soit sur la société d’hier, d’aujourd’hui ou de demain. « L’idée c’est que l’homme, à partir du moment où il prend conscience de sa finitude, va essayer de la conjurer » d’après le commissaire. Je me suis alors pris au jeu de ce que cher Müller appellera plus tard l’« intermédialité ». La dynamique de cette exposition temporaire permet en effet l’exquise rencontre de lectures d’œuvres de diverses provenances spatio-temporelles. Entre familiarités, jeux sur les anachronismes et intentions ambiguës, les artistes reprennent à leur guise œuvres antédiluviennes et contemporaines. Sans oublier un détour par la pop culture, où jeux-vidéos et photos se complimentent, avec des références qui sont ou deviendront culte. Je pense à cet ironique Fucky Mickey, majeur levé, de Nicolas Rubinstein, symbole du tempus fugit par sa moitié vivante et l’autre squelettée, parfaite facture entre l’enfance et l’âge adulte. D’autres rapprochements inédits, comme tradition ésotérique et art conceptuel, sont autant de partis pris déroutants conférant toute son authenticité à cette exposition qui modèle, transforme et interroge à la matière. Les Prophéties de Nostradamus côtoient ainsi une installation de Fabien Zocco, où des engins appelés «smartphones» sont tenus par des bras robotisés affichant des phrases sibyllines, composées de mots puisés au hasard dans l’Ancien Testament. À cela s’ajoutent les cartels détaillés et la scénographie ludique de Sébastien Faye faisant primer l’objet sur le récit. Ce dernier donne carte blanche au célèbre architecte éco-critique Luc Schuiten – à peine diplômé en cette année 1967. Le tout pour le plaisir des visiteurs qui (re)découvrent les héros de leur enfance et du grand écran…Une plongée au cœur de récits utopiques, dystopiques ou uchroniques. L’ensemble n’a certes pas de véritable hiérarchie, ne s’organise pas autour d’une seule pièce maîtresse, mais il fait du temps et de l’espace des objets culturels, nous faisant naviguer de révélation en révélation. Je louerai enfin la plaisante proximité physique entre les œuvres et l’œil du spectateur sans cesse sollicité et exalté…
Un seul mot d’ordre : écrivez à vos futurs proches pour qu’eux aussi aient le privilège de s’y rendre, dans le respect des gestes barrières contre la Covid-19, évidemment. Oh, et notez la date du 20 juillet 1969, un voyageur ira fouler le sol d’une autre terre inconnue, ou devrais-je dire… lune ? »