LUNDI ALUMNI #10 : Natacha Rollinde

Fini le froid de janvier, l’équipe Lundi Alumni vous réchauffe le cœur avec les portraits des anciens élèves du CPES ! Cette semaine c’est Natacha Rollinde, doctorante en urbanisme et aménagement du territoire, qui nous fait part de son parcours passionnant. 

“Je me suis prise claque sur claque pour les résultats, je ne m’y étais pas préparée. Je n’ai pas non plus été admise à Science Po Asie que je préparais depuis la première. J’ai pris un coup à l’égo et les questions d’orientation commençaient sérieusement me peser”.

En 2012, Natacha intègre la première promotion du CPES après les aléas de l’orientation post-bac. Bonne élève, elle a fait sa scolarité dans le lycée français de Pondichéry en Inde où sa mère était professeure. Après l’obtention de son bac scientifique, elle envisageait son entrée dans une grande CPGE parisienne dans la continuité naturelle de son parcours, mais elle a dû faire face à une grande déception : “Je me suis prise claque sur claque pour les résultats, je ne m’y étais pas préparée. Je n’ai pas non plus été admise à Science Po Asie que je préparais depuis la première. J’ai pris un coup à l’égo et les questions d’orientation commençaient sérieusement me peser”. 

Natacha recherchait une formation pluridisciplinaire, un moyen d’étudier les mathématiques en continuant les sciences sociales. Ce sont ses parents qui ont découvert le CPES chez le coiffeur dans un article du Monde : “Quand j’ai lu l’article je me suis rendu compte que c’était la formation que je cherchais et dont je rêvais depuis la première”. Son dossier a été refusé, mais elle est finalement acceptée trois jours avant sa rentrée en prépa à Lakanal : “Je n’ai pas hésité une seule seconde entre la prépa et le CPES, mais j’entrais au CPES avec un certain complexe d’infériorité : confrontation au monde des prépas, les refus à science Po, mon entrée in extremis au CPES grâce aux listes d’attentes… J’avais un peu l’impression de n’avoir rien à faire ici, et ça me préoccupais beaucoup en première année.” 

“Je sortais de certains cours, comme ceux de Monsieur Combemale, véritablement bouleversée, il y avait une véritable émulation intellectuelle. Ça a confirmé ce qui me plaisait dans les sciences humaines, j’ai pu développer des outils et un esprit critique pour continuer à les explorer. Je me rends compte aujourd’hui que les cours d’initiation à la recherche et les cours en général constituent un socle fondamental dont je me servirai toujours”.  

En filière SESJ, elle continue en sociologie / économie en deuxième année aux Mines et en troisième année à Dauphine. Le fait de participer à la création du CPES en tant qu’élève de la première promo lui plaît : “On était hyper impliqués dans ce que devenait le CPES, il y avait un aspect très stimulant à sentir qu’on faisait partie de quelque chose de nouveau qu’on contribuait à construire.” Elle se remémore avec plaisir le simple cadre du CPES, les cours et les professeurs qui l’ont marquée : “Je sortais de certains cours, comme ceux de Monsieur Combemale, véritablement bouleversée, il y avait une véritable émulation intellectuelle. Ça a confirmé ce qui me plaisait dans les sciences humaines, j’ai pu développer des outils et un esprit critique pour continuer à les explorer. Je me rends compte aujourd’hui que les cours d’initiation à la recherche et les cours en général constituent un socle fondamental dont je me servirai toujours”.  

“J’étais à la cité U, j’ai rencontré des gens géniaux d’horizons différents. Mon quotidien était loin de mes parents et c’était super de vivre cela en même temps que d’autres élèves, tout comme cette construction de soi. Je partageais des moments forts avec des personnes curieuses pour plein de sujets différents : on partageait cette passion pour les cours mais aussi pour plein d’autres thématiques. C’était pour moi un cadre idéal pour le post bac, d’autant qu’on était vraiment chouchoutés.” 

“Je prenais beaucoup le RER à l’époque et en regardant défiler le paysage je me demandais souvent comment et pourquoi il était organisé de telle ou telle manière. C’est bête mais ça a influencé mon choix d’orientation !“

Après le CPES, Natacha s’oriente vers l’urbanisme un peu par hasard : “en L3 j’étais un peu perdue, je ne me plaisais pas vraiment à Dauphine. Je savais que je voulais faire de la sociologie mais je n’y voyais pas beaucoup de débouchés. J’avais postulé à Science Po mais ils ne voulaient décidemment pas de moi.” Son attrait pour la géographie, après avoir suivi les cours de cartographie, de politiques locales et géopolitique au CPES, l’a poussée à postuler au Master en urbanisme et aménagement du territoire à Paris 1. “Je prenais beaucoup le RER à l’époque et en regardant défiler le paysage je me demandais souvent comment et pourquoi il était organisé de telle ou telle manière. C’est bête mais ça a influencé mon choix d’orientation ! J’avais aussi un ami qui y postulait, donc on a pu échanger et s’entraider pour la constitution des dossiers !”. L’urbanisme est un domaine encore pluridisciplinaire, ce qui lui a permis de continuer à faire de la sociologie. Ce master est inscrit dans une vision critique au sens large, et propose une approche de l’enseignement et de la recherche différente du CPES, mais tout aussi stimulante selon Natacha. 

Finalement le plus difficile était pour Natacha de sortir complètement du CPES : “Pendant trois ans je me levais CPES à la Cité U, je mangeais CPES, tous mes amis étaient du CPES, on travaillait entre CPESiens le week-end et on partait en vacances ensemble…Bref le CPES c’était ma vie, et ç’est un peu difficile de se faire des nouveaux amis et de faire des rencontres quand on est dans sa bulle et dans son cocon.” 

“Même si le CPES ne m’avait pas spécialisée en géographie, ce n’était pas un problème. J’avais une sensation d’efficacité, une capacité à bien organiser mon travail et le regard critique sur les concepts que j’avais acquis m’a beaucoup servi.”  

Selon elle, les responsables pédagogiques du master ont beaucoup apprécié le concept du CPES, point déterminant dans la sélection. “Cette formation en urbanisme est en fait un magistère, qui commence donc dès la L3, ce qui fait qu’il n’y a pas beaucoup de place en M1 pour les élèves qui postulent en externe.” Elle déclare également que les compétences acquises au CPES lui ont permis d’aborder sereinement son master : “Même si le CPES ne m’avait pas spécialisée en géographie, ce n’était pas un problème. J’avais une sensation d’efficacité, une capacité à bien organiser mon travail et le regard critique sur les concepts que j’avais acquis m’a beaucoup servi.”  

Son master à Paris 1 propose en première année 4 mois de stage et un mémoire de recherche, puis le M2 se poursuit avec trois mois d’atelier professionnel, basés sur une commande réelle d’une entreprise à laquelle les étudiants doivent répondre, ainsi qu’un autre mémoire. “J’ai fait ces deux années de mémoire en étudiant le lien des commerçants au territoire, en étudiant leurs rapports aux représentations du métier, en m’intéressant à leurs parcours… Ce sujet m’a beaucoup plu, j’ai aimé faire du terrain. Mon moment préféré c’est celui où, après avoir accumulé des données dans tous les sens pendant des mois, on passe du flou à un agencement de la pensée qui fait qu’on voit de nouveaux liens. Pendant mon mémoire il y avait des moments où rien n’allait, je passais mes journées dehors les commerçants ne voulaient pas me parler, je n’arrivais pas à faire mon plan, ça n’avançait pas c’était un enfer. Puis tout s’agence et on se dit que c’est génial de faire de la recherche.” 

“Il y avait dans la recherche l’approche posée et sur le temps long, le fait d’avoir une première vision et de découvrir de nouveaux aspects en creusant et en allant plus loin par le temps qu’on accorde à la réflexion. Je n’avais pas vraiment envie d’aller vers des métiers hyper opérationnels, donc la recherche me convenait bien.”

Elle poursuit ce master en M2 puis s’engage dans un doctorat. “Il y avait dans la recherche l’approche posée et sur le temps long, le fait d’avoir une première vision et de découvrir de nouveaux aspects en creusant et en allant plus loin par le temps qu’on accorde à la réflexion. Je n’avais pas vraiment envie d’aller vers des métiers hyper opérationnels, donc la recherche me convenait bien.” L’avantage qu’elle note en urbanisme, c’est les multiples possibilités pour faire de la recherche appliquée, comme par exemple la thèse en CIFRE : une entreprise ou une association embauche une personne doctorante, elle passe une partie du temps en entreprise pour faire son terrain de thèse et le reste du temps se passe à la fac pour ce qui concerne la recherche. La thèse de Natacha traite des commerçants indépendants à Paris, notamment des primeurs, de leurs stratégies d’approvisionnement, en lien avec les politiques de valorisation des circuits alternatifs : l’évolution au cours du temps de ces stratégies, les perspectives de transformation du système alimentaire, les leviers ou obstacles pour mettre cela en œuvre… 

Elle réalise des stages dès la licence, dans un institut de sondage : “l’équipe était sympa et ça me permettait d’avoir une vision de la sociologie appliquée”. Puis l’atelier professionnel en master : “J’étais avec un bon groupe et le sujet m’intéressait vraiment. J’aimais beaucoup ce format du travail d’équipe sur un projet spécifique”. Enfin dans le cadre de la thèse en CIFRE à Paris&Co (Smart Food Paris).  

“Je suis dans une agence de développement économique. Chaque CIFRE est unique dans la relation qu’on a à l’entreprise.”

“Je suis dans une agence de développement économique. Chaque CIFRE est unique dans la relation qu’on a à l’entreprise.” Elle souligne que le cadre de la CIFRE peut être difficile à gérer, et que ce n’est pas toujours aussi avantageux que pour elle : “J’ai eu de la chance car les membres de l’agence comprennent que j’ai besoin de temps et que je sois souvent à la Fac. Ce que j’apprends sur le fonctionnement des enjeux d’innovation dans l’alimentation à Paris&Co est enrichissant et j’acquiert des compétences que je n’aurai pas abordées en milieu universitaire.” 

Natacha a opté pour une thèse en CIFRE plutôt que financé par une bourse doctorale. Plusieurs possibilité s’offraient alors à elle pour entreprendre le financement en CIFRE : des sites de référencement pour des labos ou structures qui font des propositions, ou faire du démarchage. Pendant un an où elle faisait son service civique, elle multiplie les démarchages, où elle explique son projet à des entreprises “Le problème c’est le moment où on leur dit qu’il faut payer et qu’ils disent non…” dit-elle en riant. Elle rencontre le directeur de Paris&Co, qui souhaitait fédérer tout type d’acteur dans Paris autour de l’innovation dans la cité dans l’espoir d’être mis en contact avec autre structure. “C’était la première fois qu’on me laissait vraiment parler de mon sujet de thèse, et aussi la première fois que je n’étais pas dans l’optique de décrocher un financement. Au bout d’une heure à discuter, je leur ai demandé s’ils cherchaient des CIFRE et l’occurrence cela correspondait à un moment où ils cherchaient à développer des liens avec la recherche. C’est comme ça que je suis désormais avec Paris&Co” C’est en ce sens qu’elle recommande vivement d’explorer toute la diversité des modes de financement de thèse, de s’entourer de directeur de recherche qui nous soutiennent car il peut être difficile de rester accroché et enfin de ne pas hésiter à solliciter des conseils un peu partout autour de nous car ce ne sont pas toujours les structures auxquelles on pense qui peuvent nous aider.

Le profil de Natacha Rollinde vous intéresse ? N’hésitez pas à la suivre sur Linkedin : https://www.linkedin.com/in/natacha-rollinde/?originalSubdomain=fr

Marine Bachot et Lena Perrinet 

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