Lozère, terre de plein air !

La Lozère : certains mais probablement -et bien malheureusement- pas tous nos lecteurs sauront ce qu’il y a derrière ce nom. Non, il ne s’agit pas du nom d’une marque de je-ne-sais-quoi, ni de celui d’une ancienne personnalité politique. Ce n’est pas non plus celui d’une station de métro (quoi que…1), mais bien le nom d’un département français où l’auteur en herbe que je suis a vécu toute son enfance. L’article que je vous propose aujourd’hui a ainsi vocation à vous faire découvrir ce département plutôt méconnu. J’essaierai de vous en donner une vue d’ensemble tout en me concentrant sur un ou deux points essentiels à mes yeux, le tout agrémenté de quelques photographies pour, je l’espère, vous donner l’envie de venir y passer quelques jours !

Avant toute chose, ayez en tête les quelques informations suivantes -autrement dit, les infos clés- sur le département : la Lozère est située dans le sud du Massif Central, à l’est de l’Aveyron, au nord du Gard et à l’ouest de l’Ardèche (la carte ci-dessous vous permettra de la localiser plus facilement). Niveau climat, celui-ci est plutôt océanique bien que dans le sud du département on puisse parler de climat méditerranéen. Cela n’empêche cependant pas d’avoir de la neige sur les hauteurs en hiver, surtout dans le nord du département. En termes de relief, sachez que la Lozère est un des départements dont l’altitude moyenne est la plus élevée de France (autour de 1000m). Au-delà de cette moyenne, le relief y est très varié, allant des Gorges du Tarn au plateau de l’Aubrac en passant par les Cévennes, la Margeride et les Grands Causses. Ce climat et ces reliefs font de la Lozère un département très rural et très peu peuplé. Au point d’en faire le département le moins peuplé de France, avec 76604 habitants au dernier recensement (INSEE 2019) ! Vous ne trouverez donc pas de grosses agglomérations dans le département, qui reste néanmoins parcouru par quelques lignes de train et de bus : son rattachement à l’Occitanie lui permet de ne pas être complètement déserté par les transports en communs, qui restent très peu abondants. Ces quelques lignes s’arrêtent dans les principales villes du département (entre autres) : Mende (la préfecture), Florac, Marvejols, Saint-Chély-d’Apcher et Langogne. Enfin, côté affaires, l’économie lozérienne repose avant tout sur les secteurs du service à la personne et de l’agriculture. Le tourisme et plus précisément le tourisme « vert » apportent aussi des revenus au département.

Maintenant que notre cher lecteur ou chère lectrice a en tête ces quelques points, nous allons nous attarder plus en détails sur certaines particularités de ce beau département. Comme mentionné plus haut, la Lozère est un département très rural, et donc grandement animé par les activités agricoles : il n’est pas rare de se retrouver au ralenti derrière un tracteur, que vous soyez en pleine « ville », sur une route départementale ou encore sur la nationale. Je vous assure, ça a son charme, ça permet d’admirer le paysage… Bon évidemment, la dimension agricole ne s’arrête pas là : le relief fait que de nombreuses zones sont difficilement exploitables, mais le paysage reste en grande majorité composé de champs de céréales et surtout de pâturages. De beaux élevages bovins paissent sur le plateau de l’Aubrac, nombreuses sont les bergeries (ou du moins les élevages ovins) sur les Grands Causses, et l’on retrouve aussi dans une moindre mesure des élevages de porcs, de petits élevages caprins, des ruchers et des châtaigneraies, notamment dans les Cévennes. Cela assure de bons produits locaux, biens ruraux, « typiques français », du type viande de bœuf, charcuteries, fromages et tout ce qui va avec. Je ne vous cacherai pas que les végétariens et les végans auront et ont un peu de mal à imposer leur régime dans notre département, même s’il y a des innovations (ruralité est loin d’être synonyme de retard sur son temps ! : avec ses nombreux festivals culturels, la Lozère est par exemple très ouverte sur le monde). 

Tant qu’on parle de gastronomie, laissez-moi vous introduire ce plat typiquement lozérien, même s’il est avant tout caractéristique de l’Aubrac : l’aligot. Je ne vous parle pas là du plat que vous trouvez sous-vide dans les supermarchés ou dans les restaurants de « spécialités régionales » parisiens. Je vous parle ici du véritable aligot mangé dans un buron bien rustique sur le plateau de l’Aubrac, au nord-ouest du département. C’est-à-dire un aligot qui sort de la grande marmite, servi à tours de bras à toute la tablée, qui file tant et si bien qu’il faut sortir les ciseaux pour couper les fils, et enfin et surtout, qui vous remplit l’estomac (avec la saucisse qui l’accompagne bien sûr). Au-delà de cette expérience qui permet de savourer l’aligot, il y a une recette authentique : une purée de pommes de terre assaisonnée d’ail et renforcée de lard fondu et de lait, à laquelle on ajoute de la tomme fraîche de l’Aubrac (attention, aucun autre fromage n’est toléré !) une fois qu’elle est bien chaude. On malaxe ensuite le tout, on fait filer avec une spatule en bois et, une fois qu’il a une consistance bien épaisse bien fileuse, l’aligot peut être servi.

Véritable aligot servi dans un buron, ici en Aveyron

Vous trouverez plusieurs autres spécialités lozériennes, notamment à base de viande telles que le fricandeau, les manouls ou encore la pouteille (ces trois plats sont faites de restes de viandes et étaient jadis destinées à bien remplir le ventre des paysans lozériens vivant sur les plateaux dans des conditions plus que rustiques). Plusieurs fromages sont aussi lozériens tels que le Pélardon, le bleu des Causses ou encore le Laguiole (pour tout vous dire, l’appellation de ce dernier ne s’arrête pas à la Lozère mais aussi aux départements environnant), mais en termes de plats sucrés, il y a moins de choix : la coupétade (un pain perdu qui se rapproche du clafouti, avec pruneaux et œufs battus), quelques biscuits locaux ou encore des spécialités à la châtaigne issues des Cévennes.

Pour en finir avec l’agriculture, parlons d’une festivité dont vous avez peut-être déjà entendu parler : la transhumance. Aujourd’hui devenue un événement très populaire et touristique, elle célèbre avant tout la montée des troupeaux (de vaches et parfois de moutons) depuis les granges et les champs dans la vallée vers les pâturages d’altitude. Les troupeaux, décorés de fleurs, drapeaux, cloches et plus encore, prennent ainsi les petites routes et les chemins de montagne pour monter vers les pâturages d’altitude, appelés estives dans le jargon. C’est là qu’ils passeront tout l’été, à paître paisiblement dans les fameuses estives. La transhumance est aujourd’hui un évènement touristique qui va bien au-delà de la montée des troupeaux : même si cela reste modeste2 en Lozère, elle est souvent accompagnée d’un marché de produits régionaux, d’animations folkloriques et d’échanges avec les éleveurs.

Penchons-nous à présent sur ce que l’on pourrait appeler les « attractions » lozériennes. Autrement dit, ce qui pourrait vous donner envie de venir y séjourner quelque temps (en plus du folklore et de la gastronomie décrits au-dessus). Comme évoqué en première partie, en Lozère, c’est avant tout le tourisme dit « vert » qui prime. Ses grands espaces sauvages et rustiques sont propices à la pratique des loisirs de pleine nature : vélo tout-terrain, course à pied, trail, canoë-kayak, équitation, escalade, randonnée, ski nordique, pêche, chasse, affûts ou encore photographie, en Lozère les options ne manquent pas pour qui est amateur de plein air (liste non exhaustive bien entendu). Arrêtons-nous un instant sur ces grands espaces sauvages (certains sont classées au patrimoine mondial de l’UNESCO) : on peut diviser la Lozère en quatre régions naturelles aux géologies distinctes : la Margeride, grand plateau granitique et basaltique couvrant une bonne partie du nord du département, plutôt boisé et comprenant de grands pâturages ; les Grands Causses (Causse Méjean et Causse Sauveterre notamment) au Sud-ouest, arides, troués de grottes ; l’Aubrac, plateau basaltique parcouru par des ruisseaux et des lacs, abritant lui aussi de nombreux pâturages et sur lequel il neige souvent en hiver ; et enfin, les Cévennes, granitiques et schisteuses, qui ont la fierté d’être un Parc National, qui plus est le seul à être habité. Ces dernières abritent aussi le mont Lozère qui donna son nom au département. Les quatre régions s’étendent bien entendu sur les départements alentours, tout comme les cours d’eau qui jalonnent le département. Cours d’eau qui sont d’ailleurs partie intégrante de ces grands espaces : les Gorges du Tarn et de la Jonte, la Vallée du Lot et celle de la Truyère, le lac de Charpal, le lac de Naussac ou encore les nombreux lacs de l’Aubrac. 

Carte topologique de la Lozère, avec les différentes régions géologiques mentionnées

Si l’on en revient aux activités de pleine nature, chaque espace a ainsi ses particularités : canoës et kayaks défilent sans relâche sur le Tarn pendant l’été pendant que d’autres observent les vautours dans les Gorges de la Jonte (et du Tarn). Les Gorges du Tarn accueillent aussi bien les plus courageux qui voudraient s’essayer au saut à l’élastique (au 107) que les plus touristes qui viennent profiter d’une glace dans les ruelles de Saint-Enimie ou de la Malène. L’initiation à la pêche se fera elle dans certains lacs ou aux abords de quelques cours d’eau suffisamment poissonneux, et la cueillette des champignons en automne dans les prairies humides du fond des vallées (j’en suis navré, mais je ne vous révèlerai pas mes coins à champignons…). Tous les causses et plateaux sont jalonnés de sentiers et chemins foulés par les randonneurs (GR et PR), qu’il s’agisse de la Margeride, de l’Aubrac (d’ailleurs parcouru par le chemin de Saint-Jacques de Compostelle) ou du causse Méjean. Quant aux Cévennes, en plus d’avoir des beaux chemins de randonnées (dont le chemin de Stevenson), elles ont de nombreux atouts : châtaigneraies, ruchers ou encore exploitations forestières qui font d’elles un parc national apprécié de la population pour les savoir-faire dont il regorge. Vous y trouverez aussi de petits villages aux maisons couvertes de lauzes (pierres plates souvent faites en schiste qui sont utilisées pour faire les toits), en plus de pouvoir observer une faune et une flore exceptionnelles. Vous trouverez aussi dans les Cévennes quelques spécialités culinaires à la châtaigne ainsi que le pélardon, un fromage au lait de chèvres, lesquelles arpentent les terrains accidentés de la région. En hiver, vous pourez revenir chaussé.e.s de vos skis pour profiter de la neige : Bonnecombe, et le Fer à Cheval sur l’Aubrac, Les Bouviers sur la Margeride, ou encore le Mas de la Barque dans les Cévennes sont recouverts d’un manteau neigeux (dont l’épaisseur a tendance à diminuer ces dernières années, je ne vous le cacherai pas) permettant la pratique du ski de fond et les descentes en luge.

(De gauche à droite et de haut en bas): 1- Les Gorges du Tarn dans la partie du Sud du département, avec ici le village de Saint-Chély du Tarn (notamment connu pour sa cascade et son pont) en contrebas à droite de la photographie. 2- Le suave manteau neigeux recouvrant une partie de la Lozère en hiver, ici vers Saint-Laurent de Muret. 3- Vautour fauve ici posé sur une plage du Tarn, que vous observerez bien plus souvent en train de planer dans les airs. 4- Piste de ski nordique en janvier 2021 au col de Bonnecombe. 5- Le lac du Moulinet près du village du Buisson. 6- « Gariotte » (petite maison en pierres sèches servant autrefois aux bergers) sur le plateau de La Cham.

On évoquait plus haut l’observation des vautours dont plusieurs colonies ont élu domicile dans les Gorges du Tarn et de la Jonte. Ce n’est pas la seule espèce que vous pourrez rencontrer en Lozère : le parc des Loups du Gévaudan, près de Marvejols, accueille plusieurs centaines de loups, faisant de lui le plus grand parc à loups d’Europe. Une partie des loups est observable directement dans les enclos du parc, et quelques meutes évoluent en semi-liberté dans un parc de plusieurs hectares à proximité : il vous faudra là venir au bon moment pour avoir la chance d’en voir un. Le parc propose aussi des ateliers de sensibilisations et autres activités autour du canidé. La présence du loup et plus précisément de ce parc en Lozère serait en partie due à une certaine légende : le département épouse plus ou moins la forme de l’ancien comté du Gévaudan, lequel a été marqué par la légende de la Bête du Gévaudan. L’histoire raconte qu’à la fin du XVIIIème siècle, plusieurs troupeaux furent attaqués par une mystérieuse bête qui aurait aussi fait une centaine de victimes humaines. Cet animal légendaire fut ensuite identifié à un loup. Pour les plus curieux d’entre vous, plusieurs versions plus complètes de la légende sont disponibles en ligne (ici, , etc…). Si l’on revient à la faune locale, le département abrite aussi la réserve des bisons d’Europe, laquelle fut au départ créée dans le but de sauvegarder l’espèce. Située à Saint-Eulalie dans la Margeride, elle propose des balades en calèche à travers la réserve pour « découvrir » les bisons. Enfin, vous trouverez aussi en Lozère des chevaux de Przewalski, ancêtres du cheval domestique (et seule espèce existant encore à l’état sauvage). Une réserve leur est dédiée sur le Causse Méjean, au sud du département, car le climat et le relief correspondent plus ou moins à leur habitat d’origine que sont les steppes de Mongolie (où les hordes lozériennes doivent d’ailleurs être réintroduites). Enfin, le randonneur attentif observera bien d’autres espèces à l’état sauvage : renards, lièvres, grenouilles, arthropodes en tout genre, faucons, cerfs, chevreuils, sangliers, loutres ou encore castors peuplent le département dans des proportions variées. Cette flore et faune exceptionnelles (comme mentionné plus haut) sont notamment dues, vous l’aurez compris, à la faible anthropisation du département. Cette faible anthropisation permet aussi d’admirer les étoiles par les belles nuits d’été, lorsque le ciel est bien dégagé.

Vous trouverez bien sûr aussi de quoi faire du tourisme plus « culturel » en explorant des ruines, en allant admirer quelques dolmens, en découvrant quelque exposition locale ou en parcourant l’histoire passée de certaines villes fortifiées, comme Marvejols par exemple (la ville royale du Gévaudan).

1 et 5- Quelques oiseaux observables dans le département (des mésanges notamment). 2- La porte du Soubeyran marquant une des anciennes entrées de la ville de Marvejols. 3- Le ciel une nuit d’été au-dessus de Marvejols, les courbes lumineuses étant dues au mouvement de la Terre « sous » les étoiles. 4- Vaches Aubrac courant vers leur éleveur, sur le plateau de l’Aubrac.

Pour celleux qui voudraient en savoir plus et notamment découvrir l’actualité « croustillante » du département, allez faire un tour du côté de la Lozère Nouvelle (le journal hebdomadaire de référence pour tout bon lozérien qui se respecte) ou le Midi Libre (plus régional).

Les paragraphes qui précèdent se sont attardés sur les particularités qui peuvent faire de la Lozère un département attrayant touristiquement parlant. Dresser un portrait complet de ce beau département impliquerai évidemment de s’attarder sur de nombreux autres points (économie, population, institutions, etc.) mais là n’était pas l’objectif de cet article. Celui-ci a pour objectif, comme dit dans les premières lignes, de faire découvrir au lecteur/à la lectrice que vous êtes mon département, et éventuellement vous donner envie de venir le visiter. J’espère que cet objectif a été atteint. Restant conscient de l’incomplétude du portrait ici dépeint, l’éventuel lectorat lozérien est chaleureusement invité à utiliser les commentaires pour compléter cet article et corriger les possibles erreurs.

Mathis Sireyjol

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1: Située sur la ligne B du RER, la station Lozère-Ecole Polytechnique devrait son nom au petit hameau de Palaiseau nommé Lozère, dans lequel se trouve la gare encore desservie aujourd’hui.

2: Un des seuls lieux lozériens où une transhumance accompagnée de tout le folklore ici décrit est organisée est le col de Bonnecombe, sur l’Aubrac lozérien. Par ailleurs, la transhumance a aussi lieu dans d’autres départements plus ou moins ruraux de France.

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Les propos avancés dans cet article s’appuient principalement (mais non exclusivement) sur les sources suivantes :

Les photos et autres contenus graphiques agrémentant l’article sont quant à eux issus des sources suivantes :

Gorges du Tarn avec St-Chély du Tarn en contrebas : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Saint_Chely_Tarn.jpg  

Carte topographique de la Lozère : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Lozere_carte_topo.svg#mw-jump-to-license

Porte du Soubeyran à Marvejols : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Porte_de_Soubeyran_in_Marvejols_(2).jpg 

Aligot filant dans un buron : https://i.pinimg.com/originals/1f/8d/21/1f8d21b49b15ed331ab33c68f2082021.jpg

L’ensemble des autres photographies ont été prises par l’auteur.

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